Le surrealisme d’aujourd’hui, 19.03— 25.04.15

Que reste-t-il aujourd’hui du mouvement surréaliste d’André Breton  et de ses adeptes? Quid des techniques et des sources d’inspiration ? Règne-t-il le même esprit d’insurrection évoqué dans la présentation de la précédente exposition sur « le surréalisme d’hier » ? Peut-on parler de continuité du mouvement ? Dans chacune de ses toiles, Jean-Pierre ALAUX rend compte de ses sensations, de ses fantasmes par l’intermédiaire de personnages, d’objets souvent symboliques, d’architectures ou de paysages. Dans son univers symboliste et onirique, les allusions poétiques, musicales ou littéraires se mêlent  à l’humour ou à la fantaisie, tout en exprimant tradition et modernité. Esprit inventif, son goût de la beauté sous toutes ses formes, du merveilleux, de l’insolite et du sacré ainsi que ses obsessions philosophiques et métaphysiques laissent transparaître à la fois poésie, mystère et humour. Privilégiant le sens plastique à l’anecdote, on peut dire que Jean-Pierre ALAUX est surréaliste tout en étant peintre de l’air, de la marine et de l’espace. Jean DESVILLES, ami personnel de Max ERNST et Dorothea TANNING, fait preuve aussi d’humour et ouvre au spectateur  la porte d’un monde à lui, où règne l’abolition des frontières entre conscience et inconscience. Sa personnalité, pourtant très ancrée dans la réalité, fait de lui un être lunaire, électron libre du XXIè siècle, à la fois héritier du mouvement surréaliste et successeur  à sa façon,  de l’esprit du surréalisme,  par son côté spontané, transparent, et imprévu. Il laisse parler sa joyeuse nature tant par les couleurs qui chantent dans ses compositions, que dans la vie. Jacques LEONARD, se joue des transparences et ses scènes de vie étranges, ses divinités mystérieuses ne laissent pas de nous étonner par leur beauté au-delà de toute réalité. Le caractère grandiose de ses œuvres ne peut qu’inspirer du recueillement. Le mysticisme qui s’en dégage révèle une nature sensible et généreuse loin des esprits étriqués. Point de rébellion, point d’idéalisme ou de prétention littéraire. Simplement un assemblage personnel de fragments de vies  vécues, ou imaginés avoir vécues. C’est par ses superpositions savamment orchestrées, cette intemporalité, que l’artiste peut rejoindre tant le Symbolisme que le surréalisme. Charlotte MASSIP, quant à elle, opte pour la technique des eaux fortes  avec le mélange d’autres techniques (rehaut aquarelle, aquatinte, collage … ) affirmant ainsi tant par les sujets représentés que par les moyens employés, son appartenance au surréalisme d’aujourd’hui. Le paysage de Vera DI BIANCA, artiste romaine, prouve aussi que le surréalisme vit encore aujourd’hui. Et si les lèvres des montagnes pouvaient parler elles vous le diraient. Les compositions imaginaires aux courbes gracieuses de Marceline ROBERT, font preuve aussi de la créativité surréaliste d’aujourd’hui, organisant une évasion spatiale au cœur de paysages inconnus, parfois mouchetés de feuille d’or,  tandis que ses gouaches miniatures nous transportent sur les rives lointaines d’un océan ondulé. José MANRUBIA, ex-toréador, fervent admirateur de DALI et Picasso, des taureaux et de Don Quichotte, fait tourner la roue du Zodiaque, tout un symbole encore d’universalité. L’œuvre d’art devient alors à la fois exutoire de la conscience d’un monde supérieur  et reconnaissance d’une dimension inévitablement  limitée dans l’univers qui nous surplombe. D’autres artistes comme Myriam WITHERS et Martine COQUART-MICHAUD, ont choisi la voie de l’abstraction colorée pour attirer l’attention des collectionneurs sur ce paradoxe. Et MaMa vous touche au cœur avec son cœur à la Nature, un peu  comme la carte maitresse d’un jeu de Tarot. C’est par la voie de l’Amour que passe désormais le surréalisme, pas l’Amour de Dali pour Gala ou d’Aragon pour Elsa, un Amour avec un grand A, l’Amour Universel, celui qui vient vous consoler de toutes les blessures de la vie, celui de ses portraits d’êtres  cabossés, déformés, l’Amour de la Nature Humaine. C’est par cet Amour que le petit grain de sable que nous sommes peut trouver sa place dans l’océan du monde. C’est à cela que le panorama d’oeuvres surréalistes présentées, tend aujourd’hui, bien loin de l’esprit politique et rebelle du « surréalisme d’hier ».

Béatrice BELLAT